contact@soleilrougeclowns.fr 04 76 76 63 99

Formation

Des clowns professionnels et formés

A l’hôpital ou en milieu de soins les clowns improvisent, mais leur exercice ne s’improvise pas. Parmi eux, deux points importants pour garantir une pratique professionnelle : la formation continue des clowns et le soutien psychologique de l’équipe en supervision.

C’est, entre autre, pour cette raison que plusieurs associations françaises se sont regroupées en fédération et réfléchissent ensemble sur le métier et sur cette pratique particulière. La fédération préconise ainsi de suivre certains critères pour une meilleure qualité d’intervention. Dans cette article, nous vous proposons de lire comment sont mis en oeuvre ces deux critères au sein de Soleil Rouge.

La formation artistique

Des formateurs externes à la compagnie animent chaque année une semaine de résidence. Cette formation permet aux comédiens d’explorer leur clown autrement, d’enrichir leur expérience p1470529de jeu et également d’asseoir un vocabulaire commun permettant d’assurer la cohésion artistique de l’équipe.

Les formateurs « coachent » également les duos de clowns, en situation de jeu à l’HCE, permettant ainsi aux comédiens d’identifier leur jeu avec un partenaire et de travailler en condition réelle les propositions suggérées en atelier.

En plus de cette formation annuelle, les clowns se retrouvent une journée par mois lors d’ateliers dans le but de développer une pratique commune en travaillant les codes p1470476qui leur permettent de jouer ensemble, de développer les aspects techniques du jeu en duo, les types d’entrée dans les chambres, ainsi que les compétences artistiques (chant, marionnettes, musique, acrobatie, magie, jonglage…) utilisées par les clowns en improvisation.

La formation psycho-médicale et la supervision

La pratique en milieu de soin nécessite la connaissance du milieu d’intervention et d’éléments de médecine et de psychologie nécessaires à un travail en lien avec les équipes soignantes. C’est pourquoi les comédien-clowns bénéficient d’une formation initiale à leur arrivée dans l’équipe ainsi que d’une formation continue. Celle ci est dispensée par les professionnels de santé de la structure où interviennent les clowns. Elle se met en place face aux questionnements de l’équipe des clowns, sur proposition du personnel soignant ou dans le cas d’intervention dans de nouveaux services.

C’est ainsi que l’équipe des comédien-clowns a eu le plaisir d’écouter et d’échanger avec  :
– Gaëlle BUISSON PAPET, psychologue au sein du service d’onco-hématologie pédiatrique qui nous a parlé de l’impact de la maladie et de l’hospitalisation sur les enfants selon les tranches d’âge.
Cécile MATHIEU-CURA, pédopsychiatre, au sujet de la prise en charge des adolescents suivis pour les troubles du comportement alimentaire ou pour des tendances suicidaires.
Adeline DHULST, psychologue en gériatrie pour nous apporter des informations sur la prise en charge des personnes atteintes de démences.
Véronique ALBALADEJO, infirmière de bloc opératoire, et le Dc Marielle CARTAL, médecin anesthésiste pédiatrique qui sont venues pour nous expliquer l’organisation du bloc opératoire

« Ces rencontres sont le témoin du caractère professionnel des interventions des clowns de Soleil Rouge : elles s’imposent avant d’aller auprès des enfants, ou de personnes âgées souffrant de problèmes de santé complexes ou sévères » Dr Corinne Armari Alla. Présidente de Soleil Rouge.

Les clowns suivent également une supervision d’équipe collective d’une demi-journée par mois qui est animée par un psychologue professionnel.

La paroles est aux formateurs

Daphné Clouzeau Daphne_Clouzeau_petit

Indispensable formation clownesque du clown hospitalier
Même si le clown improvise toute la journée à l’hôpital avec les enfants, les parents et les soignants, le métier de clown ne s’improvise pas !
Car même si le clown est un personnage touchant de ridicule, il n’en reste pas moins qu’il s’agit d’une technique de jeu qui possède ses règles et ses codes.
Tel un athlète du rire, un acrobate de la maladresse, un musicien du sensible, le comédien doit faire ses gammes et s’entraîner pour perfectionner son jeu clownesque. Et qui plus est loin de la scène, dans un cadre hospitalier, un rapport intimiste et un contexte aseptisé où l’humain est en grande vulnérabilité face à la maladie. En parallèle à une formation médicale où le comédien apprend le vocabulaire médical, le lexique des maladies rencontrées avec ses effets physiques et parfois psychiques sur le malade, les codes et les règles d’hygiène de l’hôpital ; il se doit également de s’entraîner pour perfectionner la qualité de ses interventions clownesques à l’hôpital. Et comme les clowns jouent toujours en duo, les formations clownesques sont obligatoires pour tous les clowns afin de garantir un vocabulaire clownesque commun et d’assurer une meilleure connaissance de chacun de ses partenaires de jeu.
A l’occasion de ces temps de formations clownesques, qui ont lieu régulièrement tout au long de l’année, nous, Emmanuel Sembely et Daphné Clouzeau, responsables de la co-direction artistique de l’équipe des clowns de Soleil Rouge depuis octobre 2015, encadrons à la fois des coachings et des ateliers.

Les coachings ont pour but d’accompagner les clowns sur le terrain pendant une journée pour leur faire des retours en direct sur leur pratique, leur jeu en duo et leur personnage. Les ateliers durent entre 1 jour et 5 jours successifs. Ils sont une forme de répétition avec l’ensemble des clowns sur le jeu en duo mais également sur chacun des personnages clownesques pour le préciser. Les axes pédagogiques de Daphné Clouzeau :
A la fois coach et co-directrice artistique avec Emmanuel Sembely des clowns de Soleil Rouge, mais également clown à l’hôpital depuis 8 ans au sein du Rire Médecin, je connais les enjeux de ce passionnant métier. C’est avec l’expérience de terrain ainsi qu’une pratique du jeu clownesque de 18 années, que je transmets avec tout mon cœur mes connaissances à la magnifique équipe de Soleil Rouge. Ce sont d’excellents clowns passionnés et travailleurs plein de respect et de générosité. Les accompagner est un enseignement en soi !
Le personnage clownesque : distinguer soi (espace intime) / le comédien (technicien du jeu) / le clown (joueur de soi-même dans des codes de jeu). Le clown n’est pas un personnage figé, c’est une parodie de soi-même qui évolue avec ce que l’on est en même temps que notre expérience de comédien. Travailler le personnageimg_7232 clownesque signifie se mettre à la fois dans un état d’ouverture, de naïveté, de spontanéité, de vulnérabilité, d’émotivité et de ludisme tout en étant dans la conscience de ce qui nous échappe pour jouer avec. Etre dedans et dehors au même moment ! Etre dans l’excès de toute taille et vivre à cœur ouvert dans le contrôle et le calme intérieur ! Pour cela nous travaillons :

Le jeu sensible : Le comédien joue avec sincérité, il est connecté directement à ses émotions. S’exprimer, parler et agir avec le cœur, voilà l’objectif ! Naturellement, les émotions excessives déclenchent les maladresses, les accidents, la démesure, la fantaisie et le ludisme ! Et le clown joue avec ce qu’il vit ! Jouer en écoute, c’est-à-dire à l’écoute de soi. Se connecter à ses émotions et sa nature profonde en écoutant son expression corporelle. Le jeu clownesque est un jeu physique. Apprendre à préciser le lieu d’expression, lui donner son temps de jeu et faire circuler l’énergie dans le corps. Etre à la fois plein et
relié. Laisser faire et rester conscient ! Etre pleinement engagé, à fleur de peau en gardant le recul nécessaire sur soi-même pour tout dédramatiser. En somme, devenir le technicien de son naturel ou faire de sa nature une technique. Le sensible est comme un muscle que nous étirons en faisant des gammes émotionnelles et corporelles.
Le jeu en duo : chercher la complicité et être à l’écoute de son partenaire. Dire oui à tout ce qui est proposé. L’autre a toujours raison ! Etre et faire ensemble et/ou chacun son tour pour prendre le temps de réagir et donner. Chercher aussi à construire un rapport entre les clowns (jeu conflictuel, jeu de pouvoir, jeu en famille). Même si les clowns sont en conflits, les comédiens sont toujours complices !
Existe aussi le rapport de jeu de soutien ou du contre-point (faire-valoir) Etirer les situations clownesques : L’art du clown est de mettre en lumière les moments où il est dans la difficulté, face à un obstacle. Obstacle qui vient de son conflit intérieur ou d’une situation inconfortable. Le jeu clownesque joue avec les maladresses et de les failles de l’humain et fait durer toute situation qui le met face à son ridicule. Le clown fait rire malgré lui et le comédien met tout en œuvre pour déclencher
le rire. L’un est naturellement ridicule et l’autre joue avec les maladresses, les excès, la rythmique deimg_7256 l’état et tous les accidents que cela entraîne.

Le rapport public : Le jeu clownesque est un jeu basé sur le regard de l’autre sur soi et le regard que nous
portons sur nous-mêmes. Nous sommes ici dans un rapport qui va de l’espace intime à l’espace public. Le
public est un partenaire pour le clown. Il existe 2 rapports essentiels au public : rapport direct/frontal
(complicité, réaction directe) et rapport indirect/latéral (renvoie d’émotions sur ce que le clown vit avec
son partenaire ou en rapport à une action, un prétexte, un évènement extérieur).

A l’hôpital les comédiens varient les rapports au public selon les limites de l’enfant et des familles mais aussi selon le jeu développé. Par exemple, il favorise le jeu indirect lorsqu’un enfant est craintif. Apprendre également à
laisser les temps public, c’est-à-dire laisser au public le temps de réaction, écouter ce qu’il vit et faire les allers-retours entre soi et le public pour se remplir et nourrir son état de clown. Le comédien doit être à l’écoute du public, s’adapter à son énergie, faire durer ce qui fonctionne, étirer la situation qui fait rire et
progressivement emmener l’enfant ailleurs, même l’espace d’un instant. Car le rôle du clown est de tout dédramatiser et de rendre les gens heureux en faisant rire de lui parce qu’il montre pire que soi !
Le jeu vocal et le chant : la voix est un vecteur d’émotions mais aussi un instrument à air qui demande une technique vocale. Différentes approches de la voix : voix/expression (les onomatopées = mots du cœur ; les émotions chantées), voix/jouet (le gromelot = jouet musical des langues), voix/instrument (le chant, comment faire un cadeau au public, la prouesse technique : chanter un exploit (jeu de fantaisie),chant de parodie).
L’exploit l’air de rien : C’est lorsque l’exploit d’une technique (physique, vocale, musicale, etc) arrive au milieu d’un jeu et d’un rapport entre les clowns, sans que le public s’en aperçoive, qu’il est le plus fort ! Cette triche clownesque peut se réaliser à partir d’une maladresse, d’un accident clownesque, au hasardimg_7203 du jeu, d’une idée née d’une impulsion, ou encore d’un prétexte annoncé (chant, musique, danse, acrobatie, magie, ventriloquie…). En ce qui me concerne, il s’agira de développer l’exploit vocal et musical. Qui y a-t-il de plus touchant et de plus drôle qu’un clown qui chante le mieux possible son air d’opéra favori… en pleurant à chaudes larmes ? Le répertoire de chants : Monter un répertoire de chants communs pour l’hôpital. Le projet étant de varier le répertoire pour toucher les différentes cultures rencontrées à l’hôpital. Et garder l’exigence de la simplicité du chant et du jeu vocal au service du clown. Nous avons mis dans notre panier les chants suivants : Zamina (Cameroun) ; Lomalelale (Madagascar) ; Quizas (Espagne + versions française et anglaise) ; Niwawa (berceuse chinoise) ; Uélé Mama (petit chant africain)

L’art clownesque est un art complexe et total où le comédien doit maîtriser une grande technique de jeu mais également d’autres techniques pour donner des jouets à son clown (ex : magie, instrument, voix, danse, acrobatie, contorsion, marionnette, etc…). Le clown est le travail de toute une vie car vous l’aurez compris, il évolue en même temps que nous et demande toujours à se dépasser pour être au plus proche de soi !

Daphné Clouzeau

Emmanuel Sembély Emmanuel_Sembely_petit

Former des clowns qui interviennent dans les établissements de soins, c’est vraiment un super boulot!

Transmettre des outils sensibles et techniques pour qu’ils puissent à tout moment s’appuyer sur n’importe quel partenaire,  pour aller chercher un sourire, un fou rire, un apaisement, changer l’ambiance d’un service, d’une famille, d’une chambre, c’est un magnifique boulot.

Jouer pour un seul lit, 7 dans un ascenseur, une foule qui attend, un hall qui stress, un couloir qui court, un sas qui passe, une salle qui soigne, d’urgence ou de longue haleine… C’est autant d’espace à remplir de différents rires, autant de techniques de clowns à apprendre à utiliser, autant de rapports au publique à maitriser. C’est un beau boulot !

Leur donner plein de jouets pour improviser en s’adaptant aux situations matérielles, psychologiques, sensorielles, multiples et prégnantes, c’est vraiment génial comme boulot.

Développer différents types d’humour, affiner le personnages, approfondir des styles de jeu, dans l’espace intime du bébé à l’ado en passant par l’adulte parent, ou professionnel affairé, vaste boulot.

Jouer avec la magie, la musique, le chant, la danse, le jonglage, les corps, rien du tout. Faire exister deux clowns dedans, pendant une journée émotionnellement intense, quel incroyable boulot… Ils font!

Les aider en leur apportant tout ce que je crois savoir c’est mon boulot!…Super!

Emmanuel Sembély